Compte administratif 2023 : une augmentation des dépenses sociales moindre que les autres départements

une augmentation des dépenses sociales moindre que les autres départements

Ce compte administratif 2023 est une photographie des dépenses et des recettes de l’année écoulée. Pour la seconde année consécutive, 2023 a été marquée par une hausse de l’inflation de 4,9 %, qui s’ajoute aux 5,2% de 2022. Or nous le savons, les postes budgétaires des ménages ayant enregistré les plus fortes augmentations, de l’ordre de 20% depuis début 2022, sont l’alimentation et l’énergie qui sont des dépenses de première nécessité et très contraintes. Ce sont aussi des dépenses qui pèsent d’autant plus lourd sur le budget des ménages que leurs revenus sont modestes.

Les récentes évolutions du SMIC, indexées sur l’inflation, et les faibles revalorisations salariales, majoritairement inférieures à l’inflation, plongent mécaniquement des pans entiers de nos concitoyens dans la difficulté, parfois dans la pauvreté, et accroissent les cohortes des travailleurs pauvres. Aussi, lorsque nous évoquons les évolutions budgétaires des collectivités territoriales, en particulier celles des Départements, chefs de file de l’action sociale, il est important de le mettre au regard de la forte croissance des dépenses contraintes des ménages. 

L’Isère dépense moins dans l’action sociale que la moyenne nationale

Dans un effort national de réponse à la situation inflationniste, l’observatoire national de l’action sociale a enregistré les évolutions suivants à l’échelon national : 

“les augmentations les plus importantes concernent les dépenses dans trois domaines ; aide sociale à l’enfance (+ 10,2 %), personnes en situation de handicap (+6,7 %) et personnel départemental (+6,7%).” “Le soutien aux personnes âgées dépendantes évolue de façon modérée (…), soit + 3 %”

Or en Isère pour l’année 2023, 

  • Les dépenses de l’aide à l’enfance ont progressé de 7,7%, soit 3 points de moins que la moyenne nationale; 
  • L’aide destinées aux personnes handicapées a augmenté de 3,8%,  soit 3 points de moins que la moyenne nationale
  • Le soutien aux personnes âgées dépendantes est en réduction (-0,9%), soit 4 points de moins que la moyenne nationale. 
  • Dans l’ensemble, l’aide sociale augmente de 3,3% en Isère, soit 2 points de moins que la moyenne nationale et que l’inflation. 

Pour ces trois politiques, pourtant parmi les compétences cœur de notre collectivité, l’effort consenti par le Département de l’Isère est notoirement inférieur à celui engagé à l’échelle nationale. Pourquoi cette réponse si timide de votre majorité dans la période d’accélération de l’appauvrissement de certains de nos concitoyens qui, pourtant, oblige le Département a activer tous les leviers pour enrayer cette mécanique d’appauvrissement ? 

La contrainte du renchérissement des frais de la dette ?

Si d’autres Départements peinent à boucler leurs budgets à cause du renchérissement du coût de la dette, ce n’est absolument pas le cas de l’Isère qui affiche le taux “frais financiers liés à la dette par habitant” le plus faible de France, et c’est tant mieux. 

La contrainte budgétaire ? 

Ces dépenses que nous aurions dû faire

Certes les recettes de fonctionnement ont progressé moins rapidement (1.6%) que les dépenses (4.6%), notamment pour financer des mesures de revalorisation salariale des personnels du Département et compenser la hausse des coûts de l’énergie, décisions que nous partageons. 

Mais d’autres dépenses pertinentes auraient pu et dû être réalisées , au minimum sous la forme de dotations exceptionnelles pour transférer aux Iséroises et Isérois les recettes exceptionnelles dont a bénéficié le Département ces dernières années.

Par exemple, nous aurions pu

Augmenter le budget de la protection de l’enfance. Les violences intrafamiliales explosent en Isère, le Département doit protéger ces enfants en mettant les moyens. Les enfants d’aujourd’hui sont les adultes de demain. Ces moyens supplémentaires permettraient également une politique ambitieuse sur les problématiques d’inceste, sujet que nous n’entendons pas au sein de cet hémicycle.

Nous aurions pu augmenter la tarification pour les structures d’aides à domicile. Vous le savez, nous le savons notre territoire pratique des tarifs en-dessous du coût réel pour les structures. Elles sont alors particulièrement fragiles et le président du département choisit d’abonder ou non ces structures de façon exceptionnelle, ce qui pose une question grave sur ces décisions arbitraires et non équitables à travers le territoire. 

Concernant les établissements accueillant des personnes âgées et des personnes en situation de handicap, nous aurions pu revaloriser davantage les taux directeurs totalement décorrélés de l’inflation en 2023 et qui n’ont pas été rattrapés sur 2024.

Nous aurions pu revaloriser les subventions aux centres de santé sexuelle, lesquelles n’ont pas augmenté depuis de nombreuses années alors que l’accès à l’IVG, s’il est reconnu dans la constitution, est entravé sur le terrain à cause des limites budgétaires. 

Au lieu de réduire le soutien aux lieux d’accueil enfant-parent (LAEP), nous les aurions soutenus.

Enfin, nous n’aurions pas abandonné la politique de la ville comme vous l’avez fait depuis plusieurs années, sur la base d’une posture idéologique. La Politique de la ville est pourtant au croisement des politiques sociales et de la solidarité territoriale des départements sur la jeunesse, le vieillissement de la population ou de l’accès aux droits. C’est en outre une politique co-portée avec l’Etat. C’est une erreur de ne pas  financer les actions qui vont dans ce sens des publics prioritaires des départements. 

L’urgence de réinvestir l’argent économisé au détriment des politiques sociales

Au lieu de cela, votre majorité a économisé, thésaurisé, si bien que l’épargne brute dégagée en 2023 atteint encore encore des sommets à 246 M€, après le record de 2022 à 276 M€. Cela indique clairement que notre collectivité avait en 2023 des marges de manœuvres importantes. En 3 ans, depuis 2021, ce ne sont pas moins de 150 M€ que le Département a économisé sur son budget de fonctionnement, dont 100 M€ sur les politiques sociales.

Pour “préserver des marges de manœuvre” comme vous l’indiquez dans le rapport ? Mais pour quoi faire ? La situation n’est-elle pas assez sérieuse ? Pensez-vous réellement qu’on ait le temps d’attendre pour agir ? d’attendre quoi d’ailleurs ? Quels sont ces investissements si cruciaux, ces investissements d’avenir qui méritent que l’on fasse vivre des situations intenables aux partenaires de notre collectivité à qui nous déléguons le service public ? 

Ne pourrait-on pas imaginer grâce aux capacités financières qui sont les nôtres, et en restant dans de l’investissement puisque c’est votre logique, coordonner une action départementale d’envergure qui redonnent aux Isérois et aux Isérois le sentiment d’une puissance publique qui les protège ? 

Nous ferons des propositions pour ré investir socialement les 100 M€ que vous avez économisé sur les politiques sociales lors de l’examen du Budget Supplémentaire.

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