Dans le social aussi : agir aujourd’hui pour éviter des coûts et des crises demain
Intervention de Pauline Couvent lors de la Séance publique du 18 octobre 2024 sur la Décision Modificative 2024 (la décision modificative est une des révisions du budget de l’année en cours d’année).
Cette décision modificative de l’exercice 2024 fait apparaître des ajustements importants en fonctionnement sur la partie action sociale – solidarités, qui est la compétence principale de notre département. Que ce soit en raison de la revalorisation du RSA, de l’augmentation du nombre de mineurs accueillis, du nombre croissant de bénéficiaires des aides au maintien à domicile pour les personnes âgées ou en situation de handicap, ou encore des revalorisations salariales des employés, les dépenses sociales et médico-sociales sont en hausse par rapport aux prévisions du budget primitif 2024.
L’analyse que nous faisons aussi de cette décision modificative est qu’une partie des coûts auraient pu être réduite voire évitée, si certaines décisions avaient été prises plus tôt ou autrement. Cet ajustement tardif des dépenses envers les structures qui dépendent des décisions du Département, a nécessairement engendré une instabilité pour se projeter et faire des arbitrages judicieux. Deux exemples illustrent bien cette situation.
Les taux directeurs des établissements personnes âgées et personnes en situation de handicap bien trop bas en 2023 pour qu’elles puissent se projeter dans l’avenir
Premièrement, les taux directeurs pour 2023 des EHPAD, des résidences autonomie et des foyers pour personnes handicapées, qui encadrent la hausse des tarifs hébergement ont été fixés à 1,10% alors que l’inflation était de 4,9% : ces établissements n’ont eu d’autre choix que d’aggraver leur déficit, déficit que vous proposez aujourd’hui de combler, deux ans plus tard et qui participent à l’augmentation des dépenses de fonctionnement de 7 millions d’euros… Pendant ce temps, ces structures ont été empêchées de se projeter dans l’avenir et ont connu d’importantes difficultés de trésorerie.
La gestion du financement des SAAD ces dernières années qui interroge
Deuxièmement, concernant les associations d’aides à domicile et la fameuse revalorisation salariale de l’avenant 44, nous avons déposer un recours contre le Département en novembre 2023, car cette revalorisation n’avait pas été compensée pour l’année 2020 et une partie de l’année 2021. À l’époque, certains ici nous accusaient de fabuler. Si nous saluons le fait que le Département ait enfin décidé de régler la somme de 1,8 million d’euros lors de la commission permanente de septembre 2024, cette décision tardive a contribué à fragiliser encore plus les associations concernées.
En effet, deux d’entre elles ont mis la clé sous la porte : l’ADPA Grenoble et ADPAH de Vienne. La reprise in extremis de cette dernière n’a été possible qu’avec une injection massive de 3,8 millions d’euros sur 4 ans, dont 1,2 million cette année. Pourtant, l’ADPAH de Vienne demandait un soutien de 800 000 euros pour sortir des difficultés économiques dans lesquelles elle se trouvait.
Le Département doit financer l’extension du Ségur pour ne pas mettre en difficulté financière les partenaires
Ces dernières semaines, plusieurs associations nous ont alertés sur le fait que le Département leur avait annoncé ne pas compenser l’extension du Ségur en 2024, c’est-à-dire la revalorisation salariale des “oubliés du Ségur”, décidée par Mme Vautrin juste avant son départ du ministère. Vous avez depuis précisé, en conférence des Présidents, que la Décision Modificative de 2024 avait partiellement prise en compte cette revalorisation . Cela soulagera donc partiellement ces structures, mais la non-compensation complète de l’extension du Ségur met encore une fois en péril ces associations, qui jouent pourtant un rôle essentiel dans la réalisation des missions de service public déléguées par le Département. Quand comptez-vous compenser la partie restante ? Cette situation fragilise les structures, et le Département ne joue pas le rôle stabilisateur que l’on pourrait attendre ; au contraire, il ne fait que transférer l’incertitude financière.
Le département ne doit pas transférer l’incertitude financière et permettre aux structures de se projeter
Comment, dans ces conditions, construire un budget sereinement pour l’année à venir quand les signaux de vos financeurs sont incertains, que légalement doivent s’appliquer des augmentations salariales à vos salariés mais qu’elles ne sont pas compensées par vos financeurs, que ces derniers vous accusent parfois de mauvaise gestion, alors que ce sont justement ces financeurs qui vous délèguent des missions de service public? Cette question se pose depuis plusieurs années pour une grande partie des associations sociales et médico-sociales en Isère. Et de manière assez ironique, c’est aussi la question que le Département se pose pour l’exercice 2025, à cause du projet de loi de finances 2025, contre lequel vous luttez avec énergie. Nous partageons votre point de vue, c’est pourquoi nous avons voté le vœu : aucun partenaire ne devrait être traité ainsi.